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Voitures électriques : où va Tesla

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Il y a tout juste une semaine, Tesla dévoilait ses chiffres de livraisons à l’international au premier trimestre, en baisse de 8,5% par rapport au premier trimestre 2023. Pire, c’est même 20% de moins par rapport à fin 2023, une première pour l’entreprise d’Elon Musk depuis 2020. À cette mauvaise nouvelle s’est ajoutée celle annoncée par l’agence Reuters en fin de semaine dernière qui faisait état de l’arrêt du projet de la Model 2, une voiture électrique à 25.000 euros promise pour 2025.

Le groupe a aussi payé le prix fort des attaques en mer Rouge par les Houthis, le forçant à arrêter la production de voitures dans son usine de Berlin, en Allemagne, pendant deux semaines en février. Un mois plus tard, un incendie perpétré par un groupuscule d’extrême gauche a mis le feu à un pylône électrique, bloquant de nouveau la production sur ce site pendant plusieurs jours.

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En janvier, l’entreprise américaine avait également prévenu que l’année en cours aurait « un taux de croissance du volume de véhicules qui pourrait être notablement inférieur au taux de croissance atteint en 2023 ». Tesla a ainsi écoulé un peu plus 1,85 million de véhicules électriques l’année dernière dans le monde, soit plus que l’objectif fixé par Elon Musk, son directeur général (1,8 million) et proche des volumes de marques premium allemandes comme BMW et Mercedes et leurs 2,5 millions de voitures vendues. Cette annonce de baisse des ventes a été justifiée par une période « entre deux vagues de croissance ». Il n’empêche, Tesla n’avait pas connu de tels revers depuis ses échecs des débuts, et la multiplication de ces problèmes remet en cause la stratégie de son dirigeant.

Musk, des choix critiqués

Ce dernier est d’ailleurs souvent pointé du doigt comme le responsable des erreurs stratégiques de l’entreprise. Les marchés commencent à se méfier de ses annonces en fanfare, surtout en ce qui concerne les délais. Et c’est bien là que Tesla pêche. Car le constructeur a tout misé sur un modèle de voiture standard, décliné ensuite en version SUV, mais aux courbes parfaitement similaires, afin de réduire les coûts de production et d’abaisser les prix de ces véhicules. Surtout, cette simplification lui permettait d’être plus rapide que ses concurrents. Sauf que le choix d’un modèle unique commence à poser question, dans un monde où l’ensemble des constructeurs propose désormais un panel de voitures très large.

« La voiture reste encore un objet de plaisir, une grande partie des utilisateurs ne sont pas prêts à avoir le même modèle que tout le monde », prévient Philippe Houchois, analyste chez Jefferies.

Autre point qui interroge : la volonté de ne pas avoir de réseau de distribution et de ne proposer que des showrooms Tesla. Elon Musk avait justifié ce choix par un manque de connaissance sur la voiture électrique par les vendeurs des concessions franchisées et préférait garder le contrôle de ses ventes en interne. Une stratégie intégrée qui a un coût et qui empêche le développement massif des points de vente.

La prise en main des Tesla au moment de la livraison est par ailleurs souvent pointée du doigt, se faisant le plus souvent dans des grands parkings sans explication ni démonstration du véhicule. Même point de tension sur le réseau d’après-vente, obligeant les propriétaires de Tesla à voir leur véhicule immobilisé plusieurs mois en attente de réparation.

Compétition avec l’Europe et la Chine sur l’électrique

L’entreprise américaine pâtit également de la montée en puissance de ses concurrents, en particulier des constructeurs chinois. Ces derniers sont largement subventionnés par l’Etat central, qui facilite le développement à la fois des entreprises, mais également l’ensemble de l’écosystème de l’électrique.

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Désormais bien installés dans l’Empire du milieu, les constructeurs chinois veulent conquérir d’autres marchés, à commencer par l’Europe. C’est d’ailleurs sur le Vieux Continent que la bataille s’annonce la plus rude pour Tesla, puisque les constructeurs traditionnels se sont également ajoutés à cette guerre des prix, proposant des voitures autour de 25.000 euros pour contrer l’afflux chinois.

« Il faut qu’Elon Musk aille sur le marché de la voiture de masse. Au tout début de l’électrique, le marché se battait autour de voitures à 35.000 euros à 45.000 euros. Aujourd’hui, le cœur de cible se situe entre 18.000 euros et 28.000 euros », explique Bernard Jullien, maître de conférence en économie à l’Université de Bordeaux, spécialiste de l’industrie automobile.

Le dirigeant américain a par ailleurs démenti l’abandon du projet de voiture à 25.000 euros, espérant trouver un nouveau système de production simplifié, comme des Lego, pour réduire les coûts et parvenir à de tels prix.

Le besoin de cash

Mais là encore, les spécialistes du secteur se montrent sceptiques. Est-ce vraiment rentable de s’affranchir de certaines pièces d’assemblages ? N’est-ce pas un transfert de compétences plutôt que d’argent ? Autant d’incertitudes qui freinent le projet et font prendre du retard. Pourtant, Tesla doit vendre davantage de voitures. Déjà, parce que les ventes automobiles génèrent du cash à l’entreprise. Ensuite, parce que son dirigeant a annoncé un objectif de vente de 20 millions de voitures par an en 2030, soit le double du plus grand constructeur actuel, le japonais Toyota. Si les ventes sont loin du but initial, alors le titre perdra de sa valeur en Bourse.

D’ailleurs, les récents bouleversements de Tesla ont fait dévisser son titre de 34% en six mois, soit la pire performance de toutes les actions du S&P 500, l’indice boursier basé sur 500 grandes sociétés cotées sur les bourses aux États-Unis. Le constructeur reste toutefois largement au-dessus de ses concurrents en termes de valorisation, à 542 milliards de dollars, contre 305 milliards d’euros pour Toyota, le deuxième groupe automobile le mieux coté.

« Tesla doit montrer sa capacité à produire de la valeur et des leaderships crédibles s’il veut rassurer les investisseurs et garder sa valorisation. Cette dernière lui permet de lever beaucoup d’argent pour alimenter les différentes activités de son écosystème fortement consommatrices de cash que sont Starlink, Neuralink ou même Tesla. Autant d’activités où il est engagé dans une course à la recherche et au développement et à l’industrialisation », décrypte Julien Pillot, chercheur associé au CNRS et enseignant-chercheur en économie à l’Inseec.

Pour l’économiste, Tesla doit avant tout miser sur « les batteries et les systèmes de guidage autonomes ».

Tout miser sur la voiture autonome

C’est d’ailleurs l’un des gros chantiers du constructeur américain. Et pour cause, Elon Musk a annoncé la sortie de ses robots-taxis pour le 8 août prochain sur le réseau social X il y a quelques jours, rendant réelle la grande utopie de la voiture autonome.

Tesla travaille depuis longtemps sur un système de véhicules composés de caméras tout autour qui décryptent directement leur environnement. Un système qui semble le plus pertinent selon les spécialistes du secteur, alors que General Motors ou Waymo, la filiale de Google, se concentrent sur des voitures connectées à leur environnement par le biais de Lidar, une sorte de radar qui permet la détection d’objets, d’obstacles et l’estimation de la distance par laser. Un système beaucoup plus difficile et coûteux à mettre en place à grande échelle puisqu’il faut que tout l’environnement communique avec la voiture. Si le modèle Tesla a son avantage, il fait encore aujourd’hui des sceptiques.

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« J’ai testé les plus récents modèles de véhicules autonomes de Tesla sur la côte ouest et c’est impressionnant. Mais la voiture a tourné à droite directement sur la piste cyclable, il y a encore des fautes », raconte l’analyste de Jefferies, Philippe Houchois.

Surtout, le business model des voitures autonomes n’est pas vraiment certain. Car s’il offre l’avantage de faire fonctionner le véhicule quasiment toute la journée en optimisant les trajets ainsi que le salaire des chauffeurs, le coût d’entretien et le prix de production de tels véhicules vont peser dans la balance.

Pour pallier les coûts de production, Julien Pillot estime qu’il faudra partager la même plateforme que le projet de la Model 2. Malgré tout, les analystes restent méfiants : « General Motors parlait il y a quelques années d’un prix moyen de 5 dollars du mile (7 dollars du km) pour une voiture autonome. En comparaison, c’était l’équivalent d’un tarif de nuit en période de grande affluence pour Uber », relève Philippe Houchois.

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